Troubles du rythme cardiaque (arythmies)
Les troubles du rythme sont le résultat de perturbations dans la formation ou la conduction de l'excitation cardiaque. Leur diagnostic se fait par l'examen de l'ECG. Les perturbations de la formation de l'excitation se traduisent par une modification du rythme sinusal. Lorsque la fréquence sinusale de repos dépasse 100/min, [exercice, excitation psychique, fièvre (augmentation de 10 battements/min pour 1 °C). hyperthyroïdie, etc.] on parle de tachycardie sinusale ; lorsqu'elle tombe en dessous de 50/min, il s'agit d'une bradycardie sinusale. Dans ces deux cas, le rythme est régulier, alors que ce rythme oscille lors de l'arythmie sinusale, ce qui se produit surtout chez les adolescents et est lié à la respiration : l'inspiration accélère le rythme, l'expiration le ralentit.
Même lorsque l'excitation a lieu normalement dans le nœud sinusal (excitation nomotope). des excitations anormales (hétérotopes) peuvent naître dans l'oreillette, dans le nœud AV ou dans le ventricule. Les impulsions d'un foyer ectopique auriculaire (ou nodal) sont conduites aux ventricules qui échappent de ce fait au rythme sinusal : l'arythmie supraventriculaire est la conséquence d'extrasystoles (ES) auriculaires ou nodales.
Lors d'une ES auriculaire, l'onde P de l'ECG est déformée mais le complexe QRS est normal. Lors d'une ES nodale, la stimulation auriculaire est rétrograde : l'onde P en principe négative, est soit masquée par l'onde QRS, soit apparaît juste après le complexe QRS. Dans les ES supraventriculaires, le nœud sinusal se dépolarise aussi assez fréquemment, en conséquence l'intervalle entre l'onde R de l'ES (= RES) et l'onde R consécutive normale est augmenté par un intervalle de temps, requis pour que l'impulsion se déplace du foyer ectopique jusqu'au nœud sinusal : c'est l'intervalle postextrasystolique. On a alors RESR > RR et (RRES + RESR) < 2RR.
Dans la tachycardie auriculaire (foyer se dépolarisant à > 180 /min ; onde P remplacée par une ligne de base irrégulière), le ventricule peut suivre le rythme d'excitation jusqu'à une fréquence de 200/min. Pour des fréquences plus élevées, seule chaque 2e ou 3e excitation est transmise, les impulsions intermédiaires arrivant lors de la période réfractaire du nœud AV. De telles fréquences auriculaires (jusqu'à 350/min) sont appelées flutter auriculaire. Lors de la fibrillation auriculaire, les décharges du foyer peuvent atteindre 500/min, mais seules quelques impulsions occasionnelles sont transmises. L'excitation ventriculaire est alors totalement irrégulière (arythmie totale).
Une stimulation ectopique peut aussi naître dans le ventricule : on parle d'extrasystole ventriculaire. Le complexe QRS de l'ES est alors déformé. Pour une fréquence sinusale basse, l'excitation sinusale consécutive est transmise normalement aux ventricules : on parle d'extrystole interposée. Si la fréquence sinusale est plus élevée, l'impulsion sinusale suivante arrive pendant la période réfractaire du myocarde, aussi seule l'impulsion sinusale ultérieure sera efficace : on a alors une pause compensatoire. Ici RRES + RESR = 2RR.
La tachycardie ventriculaire est le résultat d'une succession d'excitations (ectopiques) ventriculaires à rythme élevé. Le remplissage des ventricules et les possibilités d'éjection cardiaque diminuent. Il peut en résulter une fibrillation ventriculaire, c'est-à-dire des pulsations non coordonnées dans le temps et dans l'espace au niveau des différentes parties du myocarde (B4). En l'absence de mesure thérapeutique, cette situation a les mêmes conséquences funestes qu'un arrêt cardiaque, car la circulation est interrompue. La fibrillation ventriculaire naît principalement lorsqu'une extrasystole survient dans la « période vulnérable » du cycle cardiaque, correspondant à la période réfractaire relative contemporaine de l'onde T de l'ECG. Les potentiels d'action apparaissant durant cette phase : a) montrent une pente moins accentuée et sont de ce fait transmis plus lentement, et b) sont de plus courtes durées. L'ensemble de ces propriétés détermine les possibilités de l'excitation myocardique répétée de parvenir dans des zones toujours ré-excitables (« ré-entrée »). La fibrillation ventriculaire peut aussi résulter d'une électrocution, et peut être traitée avec succès à l'aide d'un choc électrique adéquat (défibrillateur).
Des arythmies peuvent aussi avoir pour origine un trouble de la conduction dans le nœud AV (bloc AV) ou dans un branche du faisceau de His (bloc de branche gauche ou droit).
- Dans le bloc du 1er degré, on a un simple ralentissement de la conduction AV (intervalle PQ > 0,2 s);
- dans le bloc du 2e degré, seule une excitation sur 2 ou 3 franchit te nœud AV ; enfin
- dans le bloc du 3e degré, aucune excitation ne parvient au myocarde ventriculaire : on a un bloc complet (B5) qui se traduit par des pauses cardiaques temporaires (syndrome d'Adam-Stokes).
Des entraîneurs ventriculaires assurent la rythmicité cardiaque dans ce cas (bradycardie ventriculaire avec fréquence auriculaire normale). Il s'ensuit une indépendance totale entre les ondes P de l'ECG et les complexes QRS. Lorsque la fréquence sinusale de repos est de 60 à 80/min, celle du cœur décroît jusqu'à 40-60/min si le nœud auriculo-ventriculaire prédomine. Lorsque le bloc est total (bloc du 3e degré), le « foyer » ventriculaire fixe la fréquence cardiaque entre 20 et 40/min. Ces blocs sont une indication formelle pour l'utilisation thérapeutique d'entraîneurs artificiels (pacemakers artificiels). Un bloc de branche se traduit par une importante déformation de l'ECG car la portion du myocarde concernée par le bloc est excitée par des voies anormales à partir du côté sain.