Electrophysiologie cardiaque

Le cœur comporte deux types de cellules musculaires :

  1. des cellules qui produisent et conduisent des impulsions,
  2. des cellules qui répondent à ces impulsions par un raccourcissement (contraction). Ces cellules représentent la musculature fonctionnelle du cœur, le myocarde. La genèse de l'excitation (impulsion) siège dans l'organe lui-même contrairement à ce qui se passe pour les muscles squelettiques : on parle de rythme spontané ou d'autonomie du cœur.

Du point de vue fonctionnel, le myocarde ventriculaire est un syncitium, c'est-à-dire que les cellules ne sont pas isolées les unes des autres ; une excitation qui naît quelque part dans les ventricules conduit, quelle que soit sa localisation, à une contraction complète des deux ventricules (contraction par tout ou rien). Il en est de même pour les oreillettes.

L'excitation du cœur naît normalement au niveau du nœud sinusal : c'est l'entraîneur du cœur ou pacemaker. L'excitation s'étend à partir de ce point aux deux oreillettes et au nœud atrioventriculaire (nœud AV) et aboutit au réseau de Purkinje après avoir cheminé le long du faisceau de His et de ses deux branches (Tawara). Le faisceau de Purkinje conduit l'excitation au myocarde ventriculaire : l'excitation parcourt le myocarde de l'intérieur vers l'extérieur, de la pointe à la base, ce qui peut être suivi sur l'organisme intact à l'aide de l'ECG. Dans ce système où l'excitation naît et se propage, il n'existe pas de potentiel de repos membranaire stable ; mais après chaque repolarisation, ce potentiel de repos réaugmente peu à peu jusqu'à un certain niveau (seuil ou prépotentiel) au delà duquel un potentiel d'action (PA) se produit. On appelle potentiel diastolique maximal (PDM) le potentiel le plus négatif qui est enregistré juste après un potentiel d'action.

Les changements ultérieurs de conductance ou perméabilité g et les courants ioniques déterminent le PA des cellules du nœud sinusal (pacemaker) : à partir du PDM (environ - 70 mV au nœud sinusal), on observe d'abord une diminution continue de gK alors que, pendant le même temps, gCa et gNa sont tous deux bas ; lCa et lNa entraînent une lente dépolarisation qui peut conduire par étapes au prépotentiel ou potentiel seuil. Ensuite gCa (et un peu gNa) s'élève par palier jusqu'à ce que l'augmentation de ICa amène finalement au prépotentiel. Quand le potentiel seuil (PS) est atteint (environ - 40 mV pour le nœud sinusal), gCa augmente rapidement puis retrouve ensuite sa valeur de départ tandis que gK augmente d'abord lentement puis brutalement. La courbe du PA, après une montée rapide, s'infléchit, s'arrondit : le maximum du PA est atteint ; alors il décroît et la cellule se repolarise jusu'à son PDM. Dans le myocarde actif, la naissance rapide du PA est la conséquence de l'entrée brève mais brutale de Na+. Au contraire, au niveau du nœud sinusal et du nœud AV où la densité des canaux sodiques est plus faible, la naissance du PA (dont l'origine principale est l'entrée de Ca2+ ) est relativement plus lente.

Chaque potentiel d'action du nœud sinusal produit un battement cardiaque, ce qui signifie que la fréquence de cet entraîneur (pacemaker) détermine la fréquence des battements. Celle-ci peut être modifiée, de ce fait, par des changements de potentiels membranaires des cellules de l'entraîneur (dans le nœud sinusal) :

  1. le seuil du potentiel d'action peut être augmenté, et de ce fait, le prépotentiel est atteint plus tard;
  2. la pente du prépotentiel peut être diminuée, ce qui conduit au même résultat qu'en 1);
  3. le potentiel diastolique maximum peut devenir plus négatif et, de même qu'en 1) et 2), le seuil est atteint plus tard, la remontée du prépotentiel débutant pus bas ;
  4. la repolarisation après un potentiel d'action peut avoir un décours temporel plus lent (potentiel d'action plus durable).

Le rôle prépondérant du nœud sinusal dans l'excitation normale du cœur tient au fait que les autres parties du système excitateur et conducteur du cœur ont une fréquence propre plus basse que celle du nœud sinusal. C'est pourquoi l'excitation venue du nœud sinusal touche les autres cellules avant qu'elles ne se soient spontanément dépolarisées jusqu'à leur potentiel seuil propre.